L’automobile fait partie intégrante de la culture américaine. L’urbanisme et le commerce ont été conçus pour et autour d’elle. Les secteurs industriel et énergétique autour de la voiture sont des puissants leviers économiques. Bref, elle est la plus belle illustration du rêve américain. Les Afro-Américains n’ont pas été insensibles à ce qui est vite devenu un marqueur de réussite sociale. Comme le dit une plaisanterie (blanche), rapportée dans les excellentes notes de Little Victor, « Black people love their Cadillacs because they couldn’t own a house ».

La voiture a aussi été perçue comme un facteur d’émancipation, de liberté, permettant de voyager – à condition de trouver les bonnes adresses. D’où le succès du fameux Green Book (édité par Victor Hugo Green) qui recensait hôtels, restaurants et autres commerces acceptant les gens de couleur et qui fut particulièrement utile aux artistes, sportifs et VRP en déplacement (voir le récent film de Peter Farrelly, Green Book, sur les routes du Sud, hautement recommandable). En marge de ses anthologies habituelles, Koko Mojo consacre deux volumes à des chansons des années 1950 – âge d’or musical et automobile pour le compilateur – célébrant les Thunderbird, Dynaflow, Pontiac et surtout les Cadillac, vues comme le summum de l’excellence et de la réussite. Jimmy Liggins, Bo Diddley, Jerry McCain, Willie Brown les vantent et Wynonie Harris la veut pour corbillard.

Il est aussi question de pneu crevé, de feu rouge, d’accident et surtout de routes : les 66 et 90, les highways 60 et 61. La voiture et la conduite servent bien sûr de métaphores aux femmes et aux relations amoureuses, des expressions comme « Too many drivers » ou « Let me ride your automobile » sont limpides. Ces cinquante-six sélections entre blues, rhythm and blues ou doo-wop nous offrent une belle virée.

Jacques Périn

Note : ★★★★
Label : Koko Mojo
Sortie : 13 septembre 2019