Sam Moore (1935-2025)
11.01.2025
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Musicien, acteur, cinéaste, journaliste, dramaturge, chanteur et même, sur ses dernières années, plasticien : en presque quatre-vingt-dix ans sur cette planète, Melvin Van Peebles a connu, parfois simultanément, plus de vies qu’il n’est possible d’en compte, et la liste n’inclut pas ses jobs plus classiques, de soldat à conducteur de cable car à San Francisco, en passant par trader à Wall Street – il est le premier Afro-Américain à intégrer la bourse de New York, auteur également d’un ouvrage de conseils financiers, Bold Money: A New Way to Play the Options Market.
Né à Chicago, Melvin Van Peebles intègre après ses études l’armée de l’air, puis s’installe à San Francisco, où il publie son premier ouvrage et réalise plusieurs courts métrages. Ces derniers attirent l’attention des amateurs de cinéma indépendant européens, et après un séjour à Amsterdam Van Peebles s’installe à Paris, où il poursuit son travail de réalisateur tout en écrivant pour différents journaux dont France Observateur, Hara Kiri et une éphémère déclinaison locale de Mad. Au milieu des années 1960, il signe plusieurs romans écrits directement en français – Un Ours pour le F.B.I., Un Americain en enfer, Le Chinois du XIV, La permission – et une pièce, La fête à Harlem, que Roger Blin met en scène. Il adapte également La permission au cinéma sous le titre The Story of a Three-Day Pass, et il en signe la musique avec Mickey Baker.
De retour aux États-Unis à la fin de la décennie, Peebles y publie son premier album, dont il est l’auteur, le producteur et l’interprète, “Brer Soul”, dans un registre spoken-word, puis réalise son premier long-métrage américain, Watermelon Man, dont il écrit et interprète également la musique. Le film est un succès, mais Van Peebles, attaché à son indépendance, rejette les offres des studios hollywoodiens pour produire et réaliser son projet personnel, Sweet Sweetback’s Baadasssss Song, qu’il coproduit (avec l’aide d’un prêt de Bill Cosby), monte et dans lequel il joue le rôle principal – son fils Mario, qui fera par la suite une carrière d’acteur, alors enfant, y joue un petit rôle. Melvin écrit également la musique du film, qui est interprétée par le groupe Earth, Wind & Fire et dont l’album est publié par Stax. Produit à l’économie, le film est un énorme succès, malgré des critiques mitigées et le refus de certains cinémas de le diffuser, et lance la mode de la blaxploitation, bien que, par son contenu politique affirmé – il est notamment salué par Huey P. Newton, co-fondateur des Black Panthers – il diffère fortement de ce qui le suivra. Sa comédie musicale Don’t Play Us Cheap fait également l’objet d’un album pour Stax et d’une version filmée, et il publie également deux albums pour Atlantic et A&M.
Plus discret à partir du milieu des années 1970 – il travaille essentiellement pour la télévision –, il fait son retour dans les années 1980 et 1990, d’abord comme acteur dans différents films et séries, puis à nouveau comme réalisateur (Le conte du ventre plein, en 2000) et comme chanteur (“Ghetto Gothic” en 1995). Désormais reconnu en tant que pionnier, il est salué par plusieurs documentaires (dont How to Eat Your Watermelon in White Company (and Enjoy It)), tout en continuant ses activités cinématographiques (Confessionsofa Ex-Doofus-ItchyFooted Mutha en 2008) et musicales, de l’adaptation en comédie musicale de Sweet Sweetback à un projet, resté inédit, avec Madlib, en passant par des concerts avec le groupe Burnt Sugar (sous le nom de Melvin Van Peebles wid Laxative) et un album avec les Heliocentrics, “The Last Transmission”. Il était encore apparu en 2018 dans Armed, un film réalisé par son fils.
Frédéric Adrian
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