Cherise, Pop-Up du Label, Paris, 2024
09.12.2024
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9 février 2023.
L’ombre de Dr. John a toujours plané au-dessus des Nuits de l’Alligator et de leurs choix musicaux à la fois au cœur et à côté du blues. Il n’est donc pas surprenant que l’hommage au bon docteur publié sur disque en septembre dernier par Matthis Pascaud et Hugh Coltman trouve sa place dans la programmation du festival itinérant, même si c’est seulement pour une date parisienne, dans une Maroquinerie bien remplie.
Pas annoncé, c’est le chanteur Camille Bazbaz qui assure la première partie en solo. Son piano électrique, sa voix éraillée, son chapeau et ses chansons (en français) à l’ironie douce-amère s’avèrent finalement assez cohérents avec l’univers de Dr. John, et son court set est bien accueilli.
Le temps d’un entracte et c’est l’équipe du projet emmené par Matthis Pascaud et Hugh Coltman qui débarque avec Christophe Panzani au saxophone ténor, Karl Jannuska à la batterie, Raphaël Chassin aux percussions et Pierre Elgrishi à la basse. Sans surprise, le répertoire emprunte à celui du disque “Night Trippin’”, soit des compositions gravées par Dr. John pour l’essentiel entre 1968 et 1971 lors de sa période “Night Tripper” dans un registre très particulier entre rock psychédélique, funk vaudou et R&B louisianais qui n’a que peu d’équivalents, son propre créateur ne le reprenant lui-même que très rarement sur scène ultérieurement, en dehors de l’iconique I walk on guilded splinters. Difficile en effet d’évoquer la bizarrerie intrinsèque – même pour l’époque – et le côté habité de cette musique ! Inutile de dire, donc que la démarche de Pascaud et Coltman est audacieuse.
Si sur disque la réussite est incontestable, le passage à la scène n’est pas évident, d’autant que le choix de rester très proche de l’album – y compris dans l’ordre dans lequel sont joués les morceaux – semble un peu corseter les musiciens qui semblent hésiter à sortir du cadre, au point que même le jeu de scène du pourtant très charismatique Hugh Coltman paraisse par moment manquer de spontanéité. Les meilleurs passages, musicalement, sont ceux au cours desquels l’ensemble semble un peu lâcher les rênes, dans une logique “jam band” à la Allman Brothers, avec en particulier quelques jolis échanges entre la batterie et les percussions, mais ces moments sont un peu trop rares, et l’ensemble donne une certaine impression de linéarité qui frôle parfois la monotonie.
En fin de concert, l’inclusion de Back to back, absent de l’album, vient un peu rompre le rythme, mais c’est surtout le retour de Camille Bazbaz et de son piano électrique et l’arrivée de deux choristes invitées, Marion Rampal et Nathalie Loriot, qui apportent l’énergie et la rupture de ton attendue pour une magnifique version de I walk on guilded splinters qui aurait pu encore se prolonger quelques minutes.
En rappel, le groupe s’offre un petit saut temporel de quelques années et reprend le plus grand tube de Dr. John, Right place, wrong time, dans une version dynamique qui vient clore en beauté une soirée à la hauteur de l’artiste mis à l’honneur.
Texte : Frédéric Adrian
Photos © Wilfried-Antoine Desveaux