Cherise, Pop-Up du Label, Paris, 2024
09.12.2024
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23 au 27 mai 2023.
Cette 7e édition a débuté sous les meilleurs auspices avec en préambule à la médiathèque de Suresnes une soirée conférence de Philippe Sauret, Zydeco (origines et évolution), en compagnie de David Rolland et de son groupe pour l’accompagnement musical. Et le lendemain avec Christophe Mourot pour une conférence sur L’harmonica, le souffle du blues à la librairie le Point de Côté, accompagné par Thomas Troussier et Eric C.
En plus de ces conférences, la projection du film documentaire Mississippi Ramblin’ de Nicolas Binet au cinéma Le Capitole avec la participation du scénariste JM Dupont et du dessinateur Mezzo du roman graphique Love In Vain a attiré de nombreux spectateurs. Notons également la présence de Fred Médrano ainsi que son exposition Blues Histoires Courtes à la médiathèque.
Le jeudi 25, nous eûmes le plaisir d’applaudir Tao Ravao et Vincent Bucher qui ouvrirent la soirée. Tao venu avec kabosy (apparentée à la guitare) et valiha (harpe cylindrique sur un gros tube de bambou), instruments traditionnels de la culture malgache, nous a apporté une fois de plus la preuve que le blues n’a pas de frontière. D’autant qu’épaulé par Vincent Bucher, leur musique (centrée principalement sur leur dernier album “Piment Bleu”, paru en 2021, qui a obtenu un prix Charles Cros) évolue des terres rouges au delta du Mississippi sans que l’ensemble affecte la virtuosité de ces musiciens qui se connaissent depuis plus de 30 ans.
Miss Bee & The Bullfrogs en provenance de Pau prennent le relai. Atmosphère soul blues pour cette formation aguerrie aux jam sessions locales. Malgré l’absence de leur section rythmique habituelle, remplacée pour la circonstance par Thomas Labarbe à la basse et Fabrice Seny-Couty à la batterie, on comprend à l’écoute que le quartet gravisse allègrement les étapes de tremplins nationaux en sélection pour l’Euro Blues Challenge !
Pour terminer cette soirée, retour sur scène de Vincent Bucher, accompagné de Christophe Garreau à la basse, de Jérémy Tepper à la guitare et de Christophe Gaillot à la batterie. Que dire quand on est un fervent admirateur de ce qu’a pu produire Vincent en solo ou avec nombre de musiciens africains ? Ici nous sommes dans un registre Chicago blues, amené par un rythmicien endiablé qui sait s’appuyer sur des compagnons de longue date. Le public leur fait un triomphe.
Pour la deuxième soirée, changement d’ambiance avec tout d’abord The Jake Walkers, tourangeaux pratiquant un country blues relativement acoustique. Ady à la guitare impressionne tant par son humour que par ses variations de répertoire (superbe version de St James Infirmary). Dans l’ensemble une prestation fraîche, légère et qui donne envie d’en entendre plus.
An Diaz & Yokatta Brothers sont les membres de la connexion arrageoise qui depuis plusieurs années se sont regroupés au sein du label Yokatta Records pour mettre en commun leur passion. An Diaz d’origine argentine est une des facettes de ce label qui nous permet de retrouver Manuslide à la guitare et au ukulélé, ainsi que la section rythmique composée de Stéphane Bihan (basse, contrebasse) et Julien Mahieux (batterie). Extrait de leurs derniers albums “Spiral Blues” et “Alana”, leur répertoire défile et s’écoute avec grand plaisir d’autant que la maîtrise vocale d’An Diaz est assez exceptionnelle.
La clôture de cette deuxième soirée était assurée par Muddy Gurdy, sans le regretté Marc Glomeau, directeur musical de ce trio atypique qui a produit deux remarquables albums. Même si Marc avait exprimé le souhait que Muddy Gurdy lui survive, nous attendions avec une certaine appréhension la prestation du groupe auvergnat. Le nouveau venu n’est autre que Gilles Haenggi qui a participé en tant que batteur-percussionniste à plusieurs enregistrements de Black Chantilly, un projet très latino de Marc dans les années 2000.
Toujours accompagné par Gilles Chabenat à la vielle à roue, Tia Gouttebel se lance dans ce concert qui est en fait le premier depuis le décès de son compagnon. Ne pouvant retenir son émotion en début de set, Tia parviendra à la dépasser, appuyé par la vielle et les percussions livrant ainsi une musique relevant sur certains titres (Chain gang, Down in Mississippi, Black Madonna…) de la transe hypnotique. Tout ceci a conquis le public. The show must go on, mais qu’il est dur le chemin pour l’acceptation. Courage, Tia !
Mea culpa : Nous avons fait l’impasse des deux spectacles jeune public Les Bedaines (Bedons) de Coton de Cyril Maguy à l’Esplanade Jacques Chirac en fin de matinée et début d’après-midi, car nos cheveux blancs auraient dénoté !
Rendez-vous au Théâtre Jean Vilar pour le dernier soir en présence tout d’abord de One Rusty Band. Ils décapent les oreilles d’un public au départ surpris par les tonalités très roots rock ’n’ roll du duo. Mais très vite, la sauce prend et le public se montre très satisfait à la fois de l’aspect visuel (Léa Barbier par ses mimiques et son jeu de claquettes donne envie de danser) que musical (Gregory Garghentini, homme à tout jouer, comme à son habitude, “s’arrache”, tout en restant toujours assis).
Changement de plateau et voici le chanteur-guitariste Bassam Bellman. Épaulé par un groupe efficace (seconde guitare, basse, batterie et deux claviers) celui que nous avons connu il y a bientôt 20 ans sous le nom de scène de K-Led Ba’ Sam, n’a rien perdu de sa maestria. Rendant hommage à Lucky Peterson ou Jeff Beck, partant dans les gradins, il a montré de belles pièces de ce qui devrait constituer le plat de résistance de son prochain album.
Vint ensuite pour clôturer ce festival Kyla Brox. Fille de Victor Brox (décédé en début d’année), Kyla est une chanteuse puissante dans son registre très teinté de soul et de blues. Emportés par sa voix, nous chavirons sur de nombreux morceaux issus de son dernier album “Pain And Glory”. Rendant hommage à son père (Bluesman’s child), reprenant Hallelujah de Leonard Cohen, celle qui fut sacrée meilleure artiste à l’European Blues Challenge 2019 enchaîne les morceaux, portée par la guitare expressive de Paul Farr et une section rythmique très souple (Mark Warburton à la batterie et Danny Blomeley à la basse). La soirée se termine trop tôt pour de nombreux spectateurs qui en redemandent.
Mêlant jeunes talents et artistes confirmés, Blues sur Suresnes mériterait que le public francilien se déplace davantage. Espérons-le pour les prochaines éditions.
Texte : Serge Sabatié
Photo d’ouverture © J-M Rock’n’Blues
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