Figure majeure des “New Bluebloods” issus de la scène de Chicago dans le courant des années 1980, longtemps resté dans l’ombre de Billy Branch, Carl Weathersby n’a sans doute pas mené la carrière personnelle qu’il méritait, mais a produit, en groupe et en solo, une œuvre marquante représentative du meilleur du blues des années 1990.

Né le 24 février 1953 à Jackson, dans le Mississippi, il s’installe à l’enfance à East Chicago, dans l’Indiana. Intéressé par la musique, il bénéficie pendant son adolescence des conseils d’Albert King, ami de son père, mais ne se lance pas immédiatement dans une carrière musicale, occupant différents boulots avant et après un séjour de plusieurs années dans l’armée, avec un passage au Vietnam.

En 1979, il rejoint en tant que guitariste rythmique l’orchestre de King, avec qui il tourne jusqu’en 1982. Il commence ensuite à se produire ponctuellement avec les Sons of Blues, avant de remplacer définitivement Carlos Johnson au sein du groupe au milieu des années 1980, à temps pour une tournée européenne avec Buster Benton qui donne lieu à deux albums enregistrés en France pour Blue Phoenix. Outre son rôle de guitariste, il ne tarde pas à révéler ses talents de chanteur, compensant les limites de Branch, leader officiel de l’ensemble, dans l’exercice. S’il reste fidèle à celui-ci jusqu’au milieu des années 1990, apparaissant sur les deux disques Gitanes qui sont crédités uniquement à Branch, il ne cache pas sa frustration quant à son manque de visibilité.

Au milieu des années 1990, il lance sa carrière personnelle avec un premier album sous son nom pour Evidence, “Don’t Lay Your Blues On Me”, qui sort en 1996 et est suivi les années suivantes par “Looking Out My Window”, “Restless Feeling” et “Come To Papa”. Habitué des clubs de Chicago, et en particulier du  Kingston Mines et du Rosa’s Lounge, il se produit régulièrement en Europe et est la vedette d’une tournée Chicago Blues Festival particulièrement relevée en 2001 avec Long John Hunter et Trudy Lynn, occasion d’une prestation mémorable à la regrettée nuit du blues de Bagneux.

Plus discret au plan discographique à partir des années 2000, avec des publications sporadiques et de qualité aléatoire – un affreux album avec Bernard Allison et Larry McCray pour JSP en 2005, par exemple –, il continue malgré des difficultés de santé à donner son meilleur sur les albums des autres, de Rico McFarland à Mississippi Heat en passant par Trudy Lynn, Nora Jean Bruso, Bobby Rush ou Little Milton. Il reste également très actif sur scène, menant à nouveau une tournée du Chicago Blues Festival en 2017, à l’occasion de laquelle il répond aux questions de Soul Bag (notre numéro 228). Il reste également un habitué des clubs de Chicago, publiant en 2019 un “Live At Rosa’s Lounge”, enregistré avec son groupe dans lequel figure son protégé Corey Dennison.

Malgré des problèmes de santé croissants, il participe régulièrement au Chicago Blues Festival, apparaissant en 2023 au sein d’un Tribute to Albert King, mais est contraint de réduire largement ses activités.

Texte : Frédéric Adrian
Photo d’ouverture © Brigitte Charvolin