Fantastic Negrito, Son Of A Broken Man
13.12.2024
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Pour fêter ses 50 ans, le fameux festival de La Nouvelle-Orléans s’associe à Smithsonian Folkways et publie une belle rétrospective illustrée. Comme Soul Bag, le Jazz Fest de La Nouvelle-Orléans a vu le jour à la fin des années soixante et a connu des débuts modestes. En 1968 et 1969, le jazz club local organise deux éditions de l’International Jazzfest, mais il faut attendre l’année suivante pour que la manifestation prenne son nom définitif, “New Orleans Jazz & Heritage Festival”. En 1970, elle se tient du 22 au 26 avril et n’attire que quelques centaines de spectateurs ! Un demi-siècle plus tard, la fréquentation frôle le demi-million (475 000 personnes cette année), mais l’objectif des organisateurs n’a pas changé : il s’agit de présenter la richesse des musiques louisianaises en couplant une programmation d’artistes locaux à la venue de vedettes internationales.
À l’occasion de l’édition 2019, de nombreux partenaires et spécialistes se sont associés pour raconter cette aventure exceptionnelle dans un beau livre agrémenté de cinq CD de dix morceaux chacun. 50 titres pour 50 années. Malheureusement, faute d’enregistrements suffisants, toutes les périodes ne sont pas représentées. C’est la seule faiblesse de l’objet. Les textes, eux, sont passionnants, à la hauteur de l’histoire qu’ils racontent. Ainsi, saviez-vous que c’est à George Wein, le créateur du festival de Newport en 1954, que les autorités de NOLA ont confié l’organisation du premier Jazz Fest ? Et figurez-vous que dès ces prémisses, un certain Quint Davis fait partie des équipes organisatrices : cinquante ans plus tard, il est toujours le patron de l’événement. Un chapitre de ce livre lui est d’ailleurs entièrement consacré.
Ailleurs, il y a le récit de moments épiques comme la participation impromptue de Stevie Wonder à un concert des Meters en 1973 ou encore la venue de Bruce Springsteen en 2006, l’année suivant l’ouragan Katrina. D’ailleurs, le fait que le festival a failli s’arrêter à plusieurs reprises n’est pas éludé. Passionnant débat, par exemple, à la fin des années soixante-dix autour de la place accordée aux “visiting bands” au détriment des artistes locaux. Réponse des organisateurs : si le Jazz Fest ne gagne pas d’argent, il ne peut pas servir de plate-forme à des centaines de musiciens de La Nouvelle-Orléans. Business is business, mais parfois pour la bonne cause.
Et puis, « au Jazz Fest, écrit l’un des contributeurs, ce qui se passe entre les scènes est aussi séduisant que ce qui se passe sur scène. » D’où le chapitre consacré à la nourriture sur le festival et d’où les nombreuses photos de festivaliers en liesse. Les regarder est un spectacle en soi. Et en cherchant bien, il se peut que l’on y reconnaisse un ou deux Français, peut-être même des lecteurs de Soul Bag. Qui sait ?
Julien Crué
Note : ★★★★1/2
Label : Smithsonian Folkways
Sortie : 10 mai 2019