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Live reports / 03.08.2019

George Benson, Jazz à Juan 2019

13 juillet 2019.

Pour sa 59e édition, le festival Jazz à Juan recevait un habitué des lieux, le chanteur et guitariste George Benson, qui s’était produit sur la mythique scène de la Pinède Gould pour la première fois en 1964 aux côtés de l’organiste Jack McDuff. Après une première partie assurée par le batteur légendaire Steve Gadd et son groupe, les premières notes de guitare retentissent. C’est sur le smooth jazz de Lady que Benson fait son entrée, avec son fameux jeu octavé, toujours aussi éblouissant de maestria. La magie est intacte.

Après avoir enchaîné sur un autre instrumental, le latin jazz At the Mambo Inn, l’irrésistible gimmick de guitare de Love x love résonne dans la Pinède, sous la ferveur du public. Place au chant. Place au funk. 

Hélas, on déchante vite lorsque l’Américain aborde le premier couplet, marmonné en dehors de la mesure et complètement transfiguré. Puis quand vient le temps d’assurer le refrain, complètement recouvert par les choristes et instruments, il faut se rendre à l’évidence : la voix du chanteur n’est plus du tout ce qu’elle était sur “Give Me The Night” et son chant forcé montre d’évidentes limites liées à l’âge.

Heureusement, celui-ci retrouve des couleurs dans un registre vocal plus sobre et apaisé. L’artiste s’acquitte de Unforgettable de façon convaincante, même si les cordes au synthétiseur ajoutent des relents kitsch dont on se serait bien passés. Sous l’impulsion du claviériste Randy Waldman, le classique de Nat King Cole vire bossa nova en fin de morceau, l’occasion pour Benson de délivrer l’un de ces passages scattés en osmose avec son phrasé de guitare dont lui seul détient le secret.

Puis George pose la guitare pour se la jouer crooner intégral, en abordant deux des ballades les plus middle-of-the-road de son répertoire. Pas la meilleure des idées car son Nothing’s gonna change my love for you est particulièrement embarrassant. Les deux choristes prennent le relais lors du refrain, le chanteur ayant raisonnablement décidé de ne pas s’attaquer aux aigus. Bien mieux négocié, In your eyes fait oublier ce douloureux épisode.

La parenthèse variétés refermée, Benson renoue brièvement avec le funk sur Feel like making love, sur lequel il faut relever l’excellente prestation du claviériste Randy Waldman. Avant de revenir crooner en mode jazzy sur la ballade Moody’s mood, de son swing délicieusement melliflu que seules des faiblesses sur les octaves supérieures viennent ternir. La choriste et percussionniste Liliana De Los Reyes le rejoint en fin de morceau, endossant le rôle de Patti Austin dans ce frissonnant numéro de haute voltige.

Passage obligé en raison de son actualité discographique, le chanteur entonne Walking to New Orleans de Fats Domino, qui renoue hélas avec les cordes synthétiques… Benson se réarme ensuite de son Ibanez pour un instrumental que je n’ai pas reconnu, plutôt évocateur de ses années CTI, avant d’enchaîner avec son célèbre Breezin’

Puis le funk reprend ses droits de plus belle, sous les acclamations d’un public aux anges. Pur bonheur. Turn your love around, Love ballad et enfin un Give me the night étiré sur plusieurs minutes, en guise de final.

C’était bien évidemment compter sans un rappel, qui prolonge les festivités avec Never give up on a good thing. Avant de calmer le jeu avec un The greatest love of all très émouvant et impliqué, superbement interprété. Tous ses autres grands tubes ayant déjà été épuisés, ne restait donc que sa reprise des Drifters, On Broadway, pour fermer le bal en beauté.

Malgré une voix quelque peu fatiguée, qui trahit ses 76 printemps, donnant lieu à des prestations décevantes sur Love x love et Nothing’s gonna change my love for you, George Benson a su, le reste du temps, tirer le meilleur des circonstances sans chercher à chanter au-dessus de ses moyens. Bien que parfois sous-utilisé, son jeu guitaristique n’a, lui, rien perdu de sa superbe.

On lui saura gré de ne pas s’être étendu sur le répertoire de son dernier album “Walking To New Orleans”, en hommage à Fats Domino et Chuck Berry, pour privilégier un tour d’horizon complet de sa carrière exceptionnellement riche et protéiforme. 

Le guitariste jazz, le chanteur funk, le crooner de variétés… tous les Benson se sont télescopés pour le plus grand plaisir des fans de 7 à 77 ans, réunis dans cette grande communion au-delà des différences d’âges et d’horizons musicaux. C’est peut-être ça la magie Benson.

Line-up :
George Benson (guitare, chant), Randy Waldman (directeur musical, claviers), Liliana De Los Reyes (percussions, chant), Thom Hall (claviers), Michael O’Neill (guitare, chant), Stanley Banks (basse, tambourin), Khari Parker (batterie).

Texte : Mathieu Presseq
Photos © Gilles Lefrancq

George BensonGilles LefrancqJazz à JuanMathieu Presseq