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Chroniques / 30.06.2020

Les Staple Singers chez Curtom et Warner

Si les enregistrements post-Stax des Staple Singers ne bénéficient pas de la réputation de ce qui les a précédé, les faces gravées par l’ensemble après la faillite de la maison de disque de Memphis pour Curtom puis Warner Bros ne manquent pas d’intérêt. Déjà réédités par le passé, mais avec une disponibilité aléatoire, les quatre albums publiés par le groupe entre 1975 et 1978 font l’objet de nouvelles versions soignées, sans bonus notables mais avec de nouvelles notes érudites signées de Rob Bowman. 

Le premier disque après la fin du contrat Stax, “Let’s Do It Again”, est une totale réussite. Produit et écrit par Curtis Mayfield, publié sur son label, il marque le retour à Chicago de la famille Staple. La rupture avec ce qui vient avant est évidente dès le premier morceau, le quasi-explicite Let’s do it again, qui a dû faire rougir ceux qui n’avaient déjà pas apprécie quelques années plus tôt le virage séculier de l’ensemble. Porté par une Mavis très en voix (le superbe A whole lot of love), l’ensemble ne souffle que d’une faiblesse : sa brièveté ! Musique d’un film de Sidney Poitier, le disque ne comprend en effet que cinq titres chantés, complétés de trois instrumentaux utilitaires…

Mayfield est à nouveau aux manettes l’année suivante pour “Pass It On”, qui paraît cette fois sur Warner Bros et voit le groupe se rebaptiser The Staples, mais le résultat, dont une Mavis qui tente une réinvention assez embarrassante en diva disco, est un ratage artistique total, qui enchaîne les pires clichés du genre et noie la personnalité du groupe dans un emballage clinquant mais dépourvu de substance. 

Un an après, Mayfield est remplacé par Eugene Record, l’âme des Chairmen of the Board, pour “Family Tree”, assisté aux arrangements par Tom Tom 84. Malgré quelques concessions à l’air du temps (le nullissime Let’s go to the disco), le résultat permet à l’ensemble de retrouver quelques-uns de ses points forts, de l’angle social de la chanson titre au funk de Color me higher

Paru en 1978, “Unlock Your Mind” voit le groupe faire son retour, sous la houlette de Jerry Wexler, à Muscle Shoals. En ouverture, Chica boom et Don’t burn me renvoient au meilleur des années Stax, même si les concessions pop, comme Showdown, viennent affaiblir l’impact du disque.  Discret sur les autres albums, Pops Staples bénéficie ici d’une vraie mise en avant en mode blues, sur un Mystery train aussi inattendu que réussi. Un disque qui mérite la redécouverte !

Frédéric Adrian

Let’s Do It Again: Original Soundtrack ★★★★
Pass It On ★
Family Tree ★★★
Unlock Your Mind ★★★½
Label : Omnivore
Sortie : 5 et 26 juin 2020

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