Avec son nouvel album, le plus ambitieux à ce jour dans le fond comme dans la forme, Little Simz pourrait bien avoir atteint son objectif : livrer un futur classique qui résiste à l’épreuve du temps. Ses initiales, S.I.M.B.I., signent le prénom de naissance de l’artiste britannique de 27 ans, Simbiatu “Simbi” Ajikawo. Hip-hop, soul, funk, les 19 titres co-écrits avec le producteur Inflo composent une bande-son cinématographique, piochant dans le jazz, le gospel et l’afrobeat, marquée par au moins six singles immédiatement percutants.

Introvert ouvre l’album de la façon la plus épique qui soit, sur fond orchestral de caisses claires martiales, de cordes, de cuivres et de chœurs. À l’appui de cet hymne politique qui évoque les luttes des femmes noires, le clip mêle des images de brutalité policière à une chorégraphie de danseurs filmée dans un musée de Londres, comme une interprétation du chaos et du pouvoir réparateur de l’unité. Dans la même veine, une orchestration luxuriante donne tout son impact au titre Standing ovation. Dédié à la réussite des femmes, le groove de Woman met en scène des femmes puissantes dans un opulent environnement. L’afrobeat du morceau Point and kill, interprété avec le londonien natif du Nigéria Obongjayar, le rend irrésistible pour les pieds et le cœur. La Londonienne vient ensuite lacérer de son flow nerveux le très gospel How did you get here.

On garde pour la fin notre coup de cœur, le bouleversant I love you I hate you qui convoque une chorale arrache-cœur, à la manière des compositions d’un Kamasi Washington. Un titre en forme de catharsis pour les filles qui ont souffert de l’absence d’un père : « Never thought my parents would give me my first heartbreak. » Entourée par l’équipe du collectif Sault – Inflo, Cleo Sol, Kadeem Clarke – Little ou plutôt Queen Simz livre ce qui pourrait bien être l’album de l’année, digne d’un Grammy.

Alice Leclercq

Note : ★★★★★ (Le Pied!)
Label : Age 101 / AWAL
Sortie : 3 septembre 2021