Cherise, Pop-Up du Label, Paris, 2024
09.12.2024
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Monfort-sur-Meu, 19-20 novembre 2021.
Cédric Cobret et Nico Sturma ont concocté une programmation qui reprend en grande partie ce qui était prévu en 2020. La soirée du vendredi s’ouvre avec The Jake Walkers, venus là mettre en œuvre le prix Montfort Blues qu’ils ont reçu au Tremplin Blues des Rendez-Vous de l’Erdre de Nantes en août dernier. Le trio composé d’Ady au chant et à la guitare, Bastien Flori à la guitare, et et Jessy Gérin à la contrebasse est pour la première fois augmenté de Denis Agenet aux percussions. L’assise rythmique du groupe est plus solide sans exploiter encore toutes les possibilités de cette formule élargie. Le répertoire ne change pas avec des reprises de Janis Joplin, Robert Johnson ou de morceaux traditionnels comme le gospel Didn’t it train ou le jazz blues Saint James infirmary, et des originaux, Marie Laveau, Butterpot, entrecoupés d’intermèdes humoristiques d’Ady ou du groupe comme ce I like to blues it, blues it à la façon du film Madagascar en fin de set.
Leur succède une belle découverte de la programmation avec le groupe Wax & Boogie, formé par quatre espagnol, Ster Wax au chant, David Giorcelli au piano, Oriol Fontanals à la contrebasse, Reginald Vilardell à la batterie et nul autre que le Britannique Drew Davies au saxophone. Aucune guitare en vue. You belong to me, Stand by me (Guitar Slim), Jim Dandy to the rescue, le groupe sait choisir ses reprises, et soigne ses compositions comme Make up your mind écrit par Drew Davies qui fait le show au saxophone. Ster Wax occupe la scène avec autorité et dynamisme, et David Giorcelli est très impressionnant au piano, en boogie et en blues. Le rappel est audacieux avec At last et encore de beaux solos de saxophone et de piano.
La salle du Confluent est chaude pour le European Blues All Stars, un ensemble qui porte bien son nom, jugez plutôt : Luca Giordano, Victor Puertas, Sam Mr Tchang, Antoine Escalier et Pascal Delmas. C’est Luca Giordano qui prend le premier lead, avec Buzz me baby où il démontre qu’on peut être influencé par B.B. King et développer une identité propre, ou No consideration pour rappeler qu’il avait accompagné efficacement Jimmy Burns en tournée. Victor Puertas quitte alors ses claviers pour prendre le micro ses harmonicas et nous donner la grande claque attendue. Avec lui Jimmy Rogers, John Lee Sonny Boy Williamson, Otis Rush, Smiley Lewis, reprennent vie, dynamisés par son chant et son formidable jeu d’harmonica pendant lequel il est fascinant à regarder. Sam Mr Tchang prend la suite et s’appuie sur le répertoire du tout nouveau disque “Time To Move” de Mr Tchang Bluz Explosion. Ain’t superstitious plante le décor : blues et funky. My wife is crying montre qu’une pédale d’effet n’est pas incompatible avec le blues le plus épais et I gotta woman marque une pause soul blues, avant que Eddie C n’ Jody puis Baby I miss you, avec sa fin en gospel rapide, relancent la machine. Les rappels seront l’occasion de revoir Ady Errd et Denis Agenet.
La journée du samedi commence à 15h30 avec la conférence sur le blues de Cyril Bouysse. Au-delà de cette présentation, où il insiste avec raison sur l’importance de l’influence amérindienne dans le blues, Cyril est aussi musicien, fabricant d’instruments et de systèmes de son, et photographe. Suit le concert “off” des Deluxe Presidents au bar le Galop’1. Fred Le Baron, guitare et chante, et ses acolytes, Sami Touré, guitare, Thomas Troussier, harmonica, Yann Renoul, basse, Cyril Durand, batterie, sont au taquet dans leur élément. Leurs reprises juteuses, avec les piliers empruntés à Arthur Alexander et Paul DeLay DeLay, sont affutées comme jamais et parsemées de vocaux gouailleurs, solos de guitare millésimés et d’harmonica incendiaires. Deux sets rassasient à peine les fans mais il faut se diriger vers la salle du Confluent pour la deuxième soirée du festival.
Celle-ci est ouverte par les Cotton Belly’s et leur leader pilier Yann Malek, entourée de Mick Ravassat à la guitare, Cyril Catois à la basse et Aurélie Simenel à la batterie. Les années passent mais le temps n’a pas de prise sur le groupe et son répertoire régulièrement renouvelé dans une continuité qui charme toujours le public. Cela doit beaucoup à la voix et l’harmonica virevoltants de Yann, mais aussi à son jeu de guitare en slide, celui de Mick dont les solos sont magnifiquement dans le ton, et la rythmique élastique de Cyrille et Aurélie. Missi est un final parfait.
Vient alors le deuxième pari de la programmation avec les Cactus Candies en septet pour défendre leur album “Candle Light Rodeo”. Le chant guilleret de Lil’Ou Hornecker, façon Rose Maddox et Charline Arthur réunies, la guitare country boogie rockabilly de Jules Gretschy, et son chant clair et posé, les reprises des Maddox Brothers & Rose, Don Woody ou Buddy Holly, les compositions originales dans le ton, le son de la lap steel de Vassili Caillosse, du violon de Julie Mellaert et du piano honky tonk de JP Cardot m’ont ramené à mes premières amours, celles qui m’ont petit à petit amené au blues.
C’est Big Dez qui clôt le festival, avec le leader Philippe Fernandez, Paco Lefty Hand à la deuxième guitare, Vincent Bucher à l’harmonica, Léa Worms aux claviers, Lamine Guerfi à la basse, et Stéphane Miñana-Ripoll à la batterie. Entre les mains de Philippe, la guitare Stratocaster semble être un jouet, qui n’en émet pas moins des sons puissants en réponse aux riffs cinglants de son propriétaire. Le répertoire est puisé dans le nouveau disque “Chicken In The Car And The Car Can’t Go”, avec le morceau-titre en ouverture, suivi de Up and down the road, 300 miles for a chat, Set him free, et, je l’attendais, le formidable shuffle I got to find my baby. Avec Big Dez, il y a toujours cette urgence, ce blues marqué par le rock ‘n’ roll et la soul et c’est un univers qu’on reconnaît dès les premières notes.
C’est la fin du festival mais les émotions intenses procurées font déjà naître l’impatience d’y revenir en 2022.
Texte et photos : Christophe Mourot