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Live reports / 22.05.2024

Rives de Blues & Co 2024

Rives-du-Loir-en-Anjou (49), 2-4 mai 2024.

Pour sa troisième édition, Rives de Blues monte en puissance en ajoutant un concert aux deux soirées des années précédentes.

C’est le Carré des Arts de Verrières-en-Anjou qui bénéficie de l’extension du jeudi, avec la venue en terres angevines des Palois des SuperSoul Brothers. Le groupe désormais signé par Dixiefrog a fait ses preuves avec trois albums dont un double live. Arrivée très scénarisée des cinq musiciens et de la chanteuse-choriste avant l’entrée en scène de David Noël, alias Feelgood Dave, leader incontestable en redingote, chapeau melon et canne à pommeau ! Second degré assumé, prélude à un concert parfaitement maîtrisé, mené avec un professionnalisme qui n’étouffe pas le plaisir évident de s’adonner à une musique soul que l’on pourrait qualifier d’old school, si certaines compositions ne se révélaient étonnamment actuelles.

Les musiciens ne semblent pas souffrir des contraintes du show et chacun aura l’occasion de montrer son savoir-faire au cours du concert : Pierre-Antoine Damora à la guitare, Ludovic Timotéo à la basse, Olivier Pelfigues à la batterie, Julien Stantau aux claviers, Claire Rousselot-Paillez au chant. Mais c’est le tromboniste Julien Suhubiette, aussi étonnant par son jeu que son engagement physique, qui l’emportera à l’applaudimètre. Feelgood Dave mène le jeu, distribue les rôles et, surtout, défend un répertoire personnel, mais bien dans l’esprit soul funk revendiqué. Les tempos rapides, propices à la danse, dominent, mais quelques ballades bien senties, comme l’excellente One more day, digne d’un Lee Fields, apportent de bienvenues plages de respiration.

SuperSoul Brothers © Jacques Périn
SuperSoul Brothers © Jacques Périn
Olivier Pelfigues, Julien Stantau, Ludovic Timoteo, “Feelgood Dave” Noël, Julien Suhubiette, Claire Rousselot-Paillez, Pierre-Antoine Dumora © Jacques Périn

Rives de Blues retrouvait la salle Hervé-Bazin de Soucelles pour une deuxième soirée, placée elle aussi sous le signe de la soul. The Sunshine Ivy est une nouvelle aventure musicale réunissant quelques pointures de la scène nantaise autour d’Ivy Fof : Gabor Turi à la batterie, Arnaud Gobin à la basse, François Nicolleau à la guitare et Bruno Denis aux claviers. Pour ce qui ressemblait à un premier concert après une résidence fondatrice, le groupe fait preuve d’une identité musicale nourrie par une soul habitée, souvent proche du gospel. La sincérité et l’engagement d’Ivy sont palpables et ses compagnons attisent son ardeur aussi bien dans les compositions originales que les rares reprises. Dont une excellente version de Mercy, mercy, mercy (façon Marlena Shaw) introduite superbement au piano et assortie d’un brillant solo de guitare. La conclusion avec Wade in the water a mis la salle en ébullition. On attend maintenant l’album qui formalisera ces belles promesses.

Soul toujours portée par une voix féminine en deuxième partie de soirée, mais dans une approche plus nu soul, teintée de funk et de hip-hop. À l’évidence, les membres de SolaR sont eux aussi des musiciens aguerris, parfaitement à l’aise dans un répertoire sans doute élaboré ensemble. Pierre Olivier Cochet à la basse, Oscar Mannoni à la batterie, Raoul Ribeiro à la guitare, Olivier Guenego aux claviers et un percussionniste entourent Kissia San, une chanteuse qui a fait ses preuves avec Rumble 2 Jungle puis The Excitements (le groupe catalan où elle avait remplacé Koko-Jean).

Avec SolaR, sa voix profite de climats plus contemporains, plus aériens, pour exprimer toutes ses nuances, mais dans les moments plus intenses, elle retrouve tout son mordant. Les trois titres du premier EP sont mis en avant, dont le puissant Sun walk ou Ma reine du dancefloor, plus festif, mais aussi d’autres compos comme True love, Hard to say (et sa belle coda a cappella) ou la reprise de Cuz I love you (Lizzo). Après les remerciements d’usage, Kissia San invita Ivy Fof à rejoindre le groupe pour un final placé sous le signe de la sororité aux accents de I’d rather go blind. Conclusion en apothéose d’une soirée riche de belles découvertes.

Déclinée en trois temps, la dernière soirée était placée sous le signe du blues. Dès 19 heures, un public déjà nombreux était venu pour la conférence “L’harmonica, le souffle du blues“ dispensée par Christophe Mourot, assisté pour l’illustration par l’exemple de Thomas Troussier. L’histoire de l’instrument, son introduction dans le blues et l’évolution de sa pratique ne sont plus un mystère pour l’auditoire qui bénéficia en outre d’une première mondiale : un duo d’harmonica entre Christophe et Thomas ! La soirée commençait bien… (Jacques Périn)

Thomas Troussier, Christophe Mourot © Jacques Périn

Elle s’est bien poursuivie avec Little Big 6ster qui honorait là son prix “Rives de Blues & Co” reçu au tremplin des Rendez-Vous de l’Erdre de Nantes en août 2023. On commence à bien connaître ce groupe et on continue d’apprécier son rock empreint de blues, comme en attestent les reprises de Georgia White ou R.L. Burnside. La voix gentiment éraillée de Virginie, sa guitare acoustique ou bidon amplifiée, celle de Nicolas Bach et la rythmique basse-batterie-percussions de leurs trois acolytes, leur dynamisme scénique, emportent comme d’habitude l’adhésion du public et la place est bien chaude pour la suite.

Little Big 6ster © Christophe Mourot

Les Cinelli Brothers arrivent désormais précédés de leur réputation, aussi l’attente était grande à leur apparition sur scène. Dès le premier titre, chanté par Tom-Julian Jones, on profite de leurs harmonies vocales mais, sans pouvoir l’expliquer, les deux titres suivants, ballades soul chantées par Marco Cinelli, également au clavier, ne nous convainquent pas. Cela ne dure pas, car il prend ensuite sa guitare et chante le blues groovy Save me, avant de passer le micro à Steph Giry pour Make it through the night extrait du dernier album “Almost Exactly”, tout comme Ain’t blues but I sigh avec de nouveau Marco au chant et Tom-Julian à l’harmonica. Ces permutations vocales ou instrumentales sont une des caractéristiques du groupe, et se poursuivent quand Alessandro Cinelli prend la basse de Steph Giry qui lui prend la batterie, Marco gardant le micro pour Last cigarette. Tom-Julian lui succède pour une belle version de I can’t quit you baby où il s’illustre aussi à la guitare.

La tension est clairement montée d’un cran et le show va basculer dans la folie quand Marco, qui vient lui aussi de jouer de l’harmonica sur un titre soul rapide, prend sa guitare et démarre le boogie façon Magic Sam Chew my gum. La majeure partie du public se met debout, et une bonne partie vient danser au pied de la scène. Encore un autre boogie rapide et c’est le moment du rappel avec Thomas Troussier invité à l’harmonica. Une reprise de Matchbox, une de I’m a rocker et nous voilà tous essorés et heureux. Merci à Jean-Claude Lizée et toute l’équipe de Rives de Blues & Co et à l’année prochaine. (Christophe Mourot)

Texte et photos : Jacques Périn et Christophe Mourot

Tom-Julian Jones – Marco Cinelli © Christophe Mourot
Marco Cinelli © Christophe Mourot
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